mardi 25 avril 2017

Lettre ouverte à Emmanuel Macron

Cher Monsieur,

Le premier tour des élections présidentielles de 2017 vous a placé en tête du scrutin. Vous devenez de fait l’homme de la situation, et peut-être l’homme providentiel qui nous sauvera d’une montée de l’extrémisme et du populisme incarné par Marine le Pen et son parti le Front National.

Je comprends la joie de votre succès, mais il m’importe à cette heure avec mes faibles moyens de vous mettre en garde contre toute euphorie excessive qui risque de faire écran au danger qui sévit en France par la présence une nouvelle fois de l’extrême droite au second tour des présidentielles.
Or, sur ce terrain Monsieur Macron jusque-là vous avez manqué à l’appel !

Je n'ai pas entendu dans votre discours d’après les résultats, pas plus que dans les propos de vos porte-paroles, un message clair sur la situation catastrophique que nous sommes en train de vivre.
Certes c’est une aubaine pour vous, tous les sondages vous prédisent une large victoire, même s’il est dangereux de sous-estimer et encore plus aujourd’hui le vote FN. Vous n’ignorez pas que Marine le Pen n'attend que cette occasion de se poser en rivale de votre politique, et que, en conséquence un boulevard inespéré s’offre à elle. Rentrer dans le jeu de cette rivalité, en se cantonnant au débat d’idées, ne servira que votre cause et vos petits calculs politiques, mais feront indéniablement monter la popularité du FN aux yeux des français.

La plupart de ceux qui ont fait un autre choix que le vôtre lors du premier tour et qui voteront pour vous au second le feront avec le seul espoir de voir en vous un digne représentant, sinon de votre programme, au moins du combat contre le Front National. La démocratie vous oblige ; à eux aussi vous devez rendre des comptes.

Rappelez-vous de la digne attitude de Jacques Chirac en 2002 qui a pris acte de la gravité de l’événement, et a commis, en plus, un acte politique fort en refusant de débattre avec Jean Marie le Pen lors du traditionnel débat présidentiel.

Avec le Front National il ne s’agit plus d’un débat d’idées, cher Monsieur, d’un débat de divergence politique y compris profond, mais d’un choix de civilisation. Voulons-nous sauver la démocratie en péril, sauver nos libertés individuelles, ou bien voulons-nous le retour du fascisme, de la dictature, du racisme et du rejet de l’autre ? Ne laissez pas perdurer ce climat malsain du relativisme dangereux en laissant entendre que le Front National est un parti comme un autre.

En tant qu’électeur j’attends de vous de prendre des positions claires et sans ambiguïtés. Il n’est pas suffisant de battre le Pen même avec, espérons-le, le score le plus large possible, il faut aussi un engagement devant les français sur le long terme. Ne trahissez pas vos électeurs qui ont contribué à vous faire gagner ces élections contre Marine le Pen. Charge à vous de poursuivre ce combat républicain contre l’extrême droite, au-delà des présidentielles.

Un tel engagement de refuser toute rivalité avec un parti raciste et xénophobe, relève d’une décision d'une grande portée politique, qui marquera votre quinquennat. Toute obstination au relativisme sera nuisible pour le France et pour ses valeurs, vous passerez alors entièrement à côté de l’enjeu historique qui nous attend, et vous aurez surtout méprisé une grande partie de vos électeurs.

J’espère que je n’aurai pas à regretter mon bulletin du 7 mai !

Bien cordialement
Hervé élie Bokobza